L’UL CNT 42 relaie ce communiqué de soutien de l’UL CNT 35 pour dénoncer les conditions d’incarcérations de Libre Flot
[Posté le 18/03/2022]
L’UL CNT 35 dénonce l’acharnement carcéral à l’encontre de Libre Flot, à l’isolement depuis 14 mois. L’isolement est une torture blanche visant à briser les esprits.
Un acharnement judiciaire car le dossier est vide : c’est un harcèlement qui vise à établir uniquement une accusation à charge. La justice bourgeoise vise à briser les esprits.
Un acharnement politique car on reproche à ce camarade son engagement auprès des combattants du Rojava qui luttent pour l’émancipation de leur peuple et contre le terrorisme de DAESH. Un système politique qui vise à briser la contestation.
L’UL CNT 35 soutient Libre Flot dans son combat contre l’injustice dont il est l’objet. Comme nous soutenons tou.te.s les prisonnier.ère.s qui luttent pour leur dignité, comme nous soutenons les militant.e.s qui font l’objet de poursuites judiciaires éhontées.
Un coup porté contre l’un.e est un coup porté contre tou.te.s.
L’UL CNT 35 soutiendra Libre Flot dans son combat en déplorant qu’il soit obligé d’en passer aujourd’hui par un acte aussi extrême qu’une grève de la faim.
Nous appelons tou.te.s les organisations syndicales et politiques à soutenir Libre Flot dans son combat pour la liberté.
Nous diffusons ci-dessous, sa déclaration.
« POURQUOI JE FAIS LA GRÈVE DE LA FAIM » – Libre Flot
Cela fait plus de 14 mois que la DGSI m’a expliqué que je n’étais pas arrêté pour ce qu’elle voulait me faire croire, à savoir mon engagement auprès des forces kurdes contre Daech au Rojava.
Cela fait plus de 14 mois que rien ne valide la thèse élaborée de toutes pièces par la DGSI alors même que pendant au moins 10 mois j’ai été suivi, tracé, sous écoute 24 heures sur 24 dans mon véhicule, mon lieu de vie, espionné jusque dans mon lit.
Cela fait plus de 14 mois que je comprends que ce sont mes opinions politiques et ma participation aux forces kurdes des YPG dans la lutte contre Daech qu’on essaie de criminaliser.
Cela fait plus de 14 mois qu’on reproche une association de malfaiteurs à 7 personnes qui ne se connaissent pas toutes les unes les autres.
Cela fait plus de 14 mois à répondre aux questions d’un juge d’instruction utilisant les mêmes techniques tortueuses que la DGSI : la manipulation, la décontextualisation, l’omission et l’invention de propos et de faits afin de tenter d’influencer les réponses.
Cela fait plus de 14 mois que je subis les provocations de ce même juge d’instruction qui, alors que je croupis dans les geôles de la République, se permet de me dire que cette affaire lui fait perdre son temps dans la lutte contre le terrorisme. Pire encore, il se permet la plus inacceptable des insultes en se référant aux barbares de l’État islamique comme étant mes« amis de chez Daech ». Bien que verbal, cela reste un acte inouï de violence. C’est inadmissible que ce juge s’octroie le droit de m’injurier au plus haut point, tente de me salir, et crache ainsi sur la mémoire de mes amis et camarades kurdes, arabes, assyrien.ne.s, turkmènes, arménien.ne.s, turc.que.s et internationaux.les tombé.es dans la lutte contre cette organisation. J’en reste encore aujourd’hui scandalisé.
Cela fait plus de 14 mois d’une instruction partiale où contrairement à son rôle le juge d’instruction instruit uniquement à charge et jamais à décharge. Il ne prend pas en considération ce qui sort du scénario préétabli et ne sert qu’à valider une personnalité factice façonnée de A à Z par la DGSI, qui loin de me représenter ne reflète que les fantasmes paranoïaques de cette police politique. Ainsi, je suis sans cesse présenté comme « leader charismatique » alors même que tout mode de
fonctionnement non horizontal est contraire à mes valeurs égalitaires.
Cela fait plus de 14 mois que sans jugement on m’impose la détention dite provisoire que je subis dans les plus terribles conditions possibles : le régime d’isolement (voir les lettres de mars 2021 et juin 2021) considéré comme de la « torture blanche » et un traitement inhumain ou dégradant par plusieurs instances des droits humains.
Cela fait plus de 14 mois que je suis enterré vivant dans une solitude infernale et permanente sans avoir personne à qui parler, à juste pouvoir contempler le délabrement de mes capacités intellectuelles et la dégradation de mon état physique et ce, sans avoir accès à un suivi psychologique.
*
Après avoir sous des airs faussement neutres fourni à l’administration pénitentiaire des arguments fallacieux pour s’assurer de mon maintien à l’isolement, le juge d’instruction demande le rejet de ma demande de mise en liberté, tout comme le parquet national antiterroriste. Pour ce faire, ils reprennent presque en copier / coller le rapport de la DGSI du 7 février 2020, base de toute cette affaire dont nous ne savons pas d’où viennent les informations et dont la véracité n’a pas été démontrée. On est en droit de se demander à quoi ont servi les écoutes, les surveillances, les sonorisations et ces deux ans d’enquête judiciaire et d’instruction puisque sont occultés les faits qui démontrent la construction mensongère de la DGSI.
Le parquet national antiterroriste et le juge d’instruction n’ont de cesse d’essayer d’instiller la confusion et de créer l’amalgame avec des terroristes islamistes alors même qu’ils savent pertinemment que j’ai combattu contre l’État islamique, notamment lors de la libération de Raqqa, où avaient été planifiés les attentats du 13 novembre.
Le juge d’instruction prétend craindre que j’informerais des personnes imaginaires de ma situation alors que celle-ci est publique notamment parce que la DGSI ou le PNAT eux-mêmes ont fait fuiter l’information dès le premier jour. Il prétend ainsi empêcher toute pression sur les témoins, les victimes et leurs familles alors même qu’il n’y a ni témoin, ni victime puisqu’il n’y a aucun acte. C’est ubuesque. Est aussi évoquée sa crainte d’une concertation entre coinculpé.es et complices même si toutes et tous les coinculpé.es ont été mis.es en liberté, qu’il n’a plus interrogé personne d’autre que moi depuis octobre 2021, et que j’ai attendu patiemment qu’il ait fini de m’interroger pour déposer cette demande de mise en liberté.
Il aurait pu être comique dans d’autres circonstances de constater l’utilisation à charge de faits anodins comme : jouir de mon droit à circuler librement en France et en Europe, de mon mode de vie, de mes opinions politiques, de mes pratiques sportives, de mes goûts pour le rap engagé ou les musiques kurdes.
Le juge d’instruction s’en prend à ma mère en la désignant comme n’étant pas une garantie valable pour la simple raison qu’elle n’a pas empêché son fils âgé de 33 ans à l’époque de rejoindre les forces kurdes des YPG dans la lutte contre Daech. Encore une fois, c’est ma participation dans ce conflit qu’on criminalise. Il lui reproche également l’utilisation d’applications cryptées (WhatsApp, Signal, Télégram…) comme le font des millions de personnes en France. Enfin, il dénigre tout d’un bloc toutes
les autres options de garanties (travail, hébergement…) sans rien avoir à leur reprocher alors même que les personnels du SPIP dont c’est le métier ont rendu un avis favorable.
*
Comment alors comprendre qu’après avoir ordonné ces enquêtes de faisabilité signifiant la possibilité de me remettre en liberté avec bracelet électronique, le juge des libertés et de la détention malgré le rendu refuse ensuite de la mettre en place ? Nous sommes nombreux et nombreuses à constater que dans toute cette affaire la « justice » viole ses propres lois et est soumise à l’agenda politique de la DGSI.
J’ai récemment appris de la bouche même du directeur des détentions de la maison d’arrêt des Yvelines (Bois d’Arcy), que je remercie pour sa franchise, que mon placement et mon maintien à l’isolement étaient décidés depuis le premier jour par des personnes très haut placées et que quoi je dise ou que lui-même dise ou fasse, rien n’y ferait, que cela le dépasse, le dossier ne sera même pas lu et je resterai au quartier d’isolement et que de toute façon rien ne pourrait changer avant les élections présidentielles.
*
Puisque l’on cherche à criminaliser les militants et militantes ayant lutté avec les Kurdes contre Daech,
Puisque l’on utilise la détention soi-disant provisoire dans le but de punir des opinions politiques,
Puisque cette histoire n’existe qu’à des fins de manipulation politique,
Puisqu’aujourd’hui on ne me laisse comme perspective que la lente destruction de mon être,
Je me déclare en grève de la faim depuis le dimanche 27 février 2022 à 18 heures, je ne réclame à l’heure actuelle que ma mise en liberté en attendant de démontrer le côté calomnieux de cette honteuse accusation.
Libre Flot.
MISE A JOUR (on relaie le communiqué de l’interpro 67) :
C’est avec un ÉNORME soulagement que nous avons appris le transfert de Flo dans un hôpital civil de la région parisienne ce jeudi 7 avril.
Lundi 4 avril, alors que des actions de solidarités et des rassemblements avaient lieu un peu partout en France et en Europe suite à un appel international, ses médecins s’inquiétant de ne pouvoir assurer son suivi médical ont demandé son transfert dans un service spécialisé en nutrition. Pour cela il fallait négocier avec la justice pour lui permettre de quitter les services pénitentiaires. Le juge d’instruction qui avait fermement décidé de maintenir Libre Flot à l’isolement et en détention en février a du accepter après négociations avec les avocat.es sa libération pour raisons médicales.
Nous nous associons au soulagement de l’annonce de la libération de Libre Flot, et saluons la large solidarité et surtout le détermination de Libre Flot qui l’ont permis.
Son traitement, autant dans l’arbitraire de son emprisonnement, que la surveillance dont il a fait l’objet marquent un nouveau marqueur dans le développement autoritaire de l’État.
Nous continuerons à lutter contre, et à développer les réseaux d’entraides pour toutes et tous les prolétaires attaqué·e·s par ce même État et cette même logique.